ROMAN : Le collier rouge

Auteur : Rufin
Editeur : Gallimard


Nous sommes dans une petite ville du Berry, en 1919. L’ombre de la Grande Guerre plane encore mais elle se résume, au début de ce récit, à un prisonnier unique maintenu dans sa cellule. Il se nomme Morlac. Dehors, les aboiements d’un chien, le sien. Gueule cassée, l’animal ne quitte jamais son poste. Il fait chaud, très.


Morlac a été arrêté pour outrage à la Nation. Et un juge, Lantier, militaire en fin de carrière, est chargé d’instruire l’affaire et de tout mener au clair avant de rendre son verdict. Il s’attache étrangement au détenu, tente de comprendre ses motivations. D’atténuer ses charges. Mais l’homme est farouchement décidé à n’avoir aucune circonstance atténuante… Et le juge d’aller plus avant dans son enquête en cherchant, parmi les personnes qui le connaissent, qui est vraiment Morlac. Et quelle relation l’homme entretient-il avec ce chien d’une fidélité absolue ?


Sorte de huis-clos partiellement à ciel ouvert, Le collier rouge est un roman qui questionne le vrai sens du mot humanité. Comment la guerre a changé les hommes et les âmes. Abordée ici à travers la perception intérieure, la réflexion laissée dans l’esprit d’un simple soldat remet en cause les valeurs telles que loyauté, courage, fidélité. Pour écrire ce récit, Jean-Christophe Rufin s’est notamment inspiré de la place qu’ont tenue les chiens dans les tranchées, mais aussi d’une anecdote familiale racontée par un ami.

Ce récit est aussi celui des mutineries et des tentatives de fraternisation de 1917. De l’absurdité de la guerre, tout autant que de la victoire. Le vrai triomphe étant l’absence de guerre en soi. Un livre qui dessine ses personnages en peu de pages. On le dira sensible, sans fioritures, allant au creux des esprits enfermés en eux-mêmes, offrant au regard du lecteur leurs difficultés de se comprendre, libérant les non-dits.

On ne pourra néanmoins nier que l’intrigue soit un peu convenue et c’est ce qui fait la faiblesse de ce récit narrant plusieurs face-à-face et moments d’introspection. L’amour vient y planter sa graine, le personnage principal voit ses croyances vaciller et veut à tout pris faire régner la justice. Etc.

Egalement disponible en livre audio, Le collier rouge y trouvera peut-être un plaisant support (même si l’auteur, malgré sa belle diction et sa voix opportune, a quand même du mal à être crédible lorsqu’il prend l’accent des gendarmes locaux de l’époque…).

Bref, une parenthèse légère chez cet auteur d’ordinaire plus prolixe.


Chronique par Virginie