BD : Lucille

Auteur : Debeurme
Editeur : Futuropolis



Ligne claire pour un ouvrage sensible. Lucille offre à lire la "perte de vie", puis l’ouverture fragile d’une jeune fille anorexique désarçonnée par un monde insatisfaisant, qu’elle croque pourtant, à sa façon. Vladimir, à ses côtés, est lui aussi démantelé par une vie qui l’écartèle. Ces deux jeunes pétris d’émotions, de contradictions, de questions, et de désirs se rencontrent pour le meilleur et pour le pire…

La simplicité et la pureté du trait offert par Ludovic Debeurme permettent au lecteur de voguer au fil des pages de cette brique (pas loin de 300 pages) qui se déguste toutefois dans la légèreté d’un souffle. Car, on le retient, son souffle, au long de ce voyage de tendresse, de douleurs, de découvertes, de peurs, et d’audaces…

Par cette BD peu ordinaire, un voile est levé sur les multiples conflits quotidiens vécus par les personnes souffrant d’anorexie… et ses retombées au sein de la relation.

Lecture vivement conseillée à toute personne non contente de réponses toutes faites, et désireuse de vivre  une vie "entière", avec ce que cela comporte de grands hauts, mais aussi de profonds bas…

Paru en 2006, ce livre à "fin ouverte" connaîtra une forme de suite avec Renée (2011), où on retrouvera Lucille, quelques années plus tard, guérie de son anorexie grâce à l'amour partagé avec Arthur, mais qui, lui, se retrouve... en prison. Un second tome aussi profondément douloureux, mais aux ambiances plus pesantes. La mélancolie y fait place à la noirceur, tantôt austère, tantôt cauchemardesque, parsemée de visions boschiennes. Le style graphique troque son dépouillement pour moins de légèreté formelle, davantage de hachures, comme pour mieux souligner l'enfermement, qu'il soit physique ou psychologique. 

Chacune d'elles différentes, très fortes, mais un peu frustrantes également, ces  bandes dessinées exceptionnelles semblent en appeler une troisième pour constituer une œuvre aboutie. 

Chronique par Roseau et Jean